Balade en forêt

Comment dresse-t-on le portrait-robot de la forêt française ?

Près d’un tiers du territoire métropolitain est couvert de forêt. Ce patrimoine d’une grande diversité biologique place la France quatrième dans le classement des États européens les plus boisés. Mais que sait-on vraiment de l’état de nos forêts ? Et comment produit-on les données de référence à leur sujet ? Entrez dans les coulisses des statistiques forestières…

Publié le 08 décembre 2021

Temps de lecture : 15 minutes

Un inventaire national pour suivre les évolutions rapides de nos forêts

La ressource forestière évolue continuellement au gré des phénomènes naturels et du fait des activités humaines. Pour préserver nos forêts, mais aussi pour en valoriser durablement les fonctions écologiques et économiques, il faut connaître précisément leurs caractéristiques, suivre leur évolution dans le temps et analyser leurs potentialités. Cette base de connaissance se construit au long cours, à partir d’un travail méticuleux de collecte de données.

En France, c’est aux équipes de l’inventaire forestier national de l’IGN que revient cette mission. Leur travail est basé sur une méthode dite en continu pour mieux rendre compte des évolutions rapides que connaissent nos forêts depuis les tempêtes de 1999 et la sécheresse/canicule de 2003. 

Les données produites alimentent des travaux et études spécifiques dans divers domaines (ressources en bois, biodiversité, changement climatique…) et impliquant des acteurs variés (filière forêt-bois, recherche, collectivités locales, etc.). Le dispositif permet aussi de répondre rapidement à des questions particulières lors d’événements climatiques majeurs (tempêtes, incendies…).

Logo Statistique publique

Depuis 2017, l'enquête de l'Inventaire forestier national figure parmi les enquêtes officielles à caractère obligatoire, reconnues d’intérêt général et de qualité statistique, au même titre que le recensement de la population par exemple. Ce label du Conseil national de l'information statistique est une garantie de qualité, d'objectivité et de protection de la vie privée. 

Une méthode statistique à partir d'échantillons représentatifs

Depuis 2005, on recourt, en France, à une méthode par échantillonnage : chaque année, un échantillon représentatif de l’ensemble du territoire est analysé. Les données collectées sur cinq années sont agrégées pour produire des résultats nationaux et régionaux fidèles à la réalité du terrain. Ainsi, par exemple, pour les campagnes d’inventaire menées de 2018 à 2022, les résultats agrégés donnent des indications fiables pour l’année médiane 2020. Les données collectées de 2019 à 2023 pour l’année médiane 2021… Et ainsi de suite…

Comment définit-on un échantillon représentatif du territoire français ? On commence par découper la France en carrés de 1 kilomètre de côté, puis on sélectionne sur cette grille environ 70 000 points géoréférencés qui définiront le centre des « placettes », les aires circulaires délimitant la zone étudiée. Le rayon des placettes peut être de 6, 9, 15 ou 25 mètres. Lorsque l’échantillon est prêt, trois étapes sont ensuite nécessaires pour réaliser l’inventaire forestier.

Trois étapes clés pour l'inventaire en continu des ressources forestières

1. L’analyse des placettes par photo-interprétation

La première phase statistique de l’inventaire est celle de la photo-interprétation. L’étude de prises de vues aériennes corrigées géométriquement en infrarouge couleur donne des indications relatives à la couverture du sol, à son utilisation (agricole, par exemple) ou à la superficie des formations arborées.

Le photo-interprète, cartographe de la forêt

En cliquant sur lecture, vous acceptez les cookies provenant de YouTube

2. Les visites de terrain

Sur les 70 000 placettes de l’échantillon photo-interprétées, environ 14 000 font l’objet d’une visite de terrain par les agents de l’IGN. Sur place, ceux-ci qualifient plusieurs dizaines d’informations concernant le peuplement forestier (circonférence, hauteur des arbres, etc.), la végétation, les caractéristiques du terrain (topographie, exposition, sol…). Des dizaines de variables sont étudiées pour rendre compte de la production forestière mais aussi de l’ensemble des services écosystémiques rendus par la forêt (la rétention d’eau, la capture de carbone, la réserve de biodiversité, etc.). Les données sont saisies sur un smartphone puis centralisées dans une base de données unique. Cinq ans après, la moitié des placettes sont à nouveau visitées pour qualifier les changements et remesurer les arbres.

Le saviez-vous ? Du fait du caractère obligatoire de l’enquête, les agents de l’IGN sont autorisés à entrer sur toute propriété non clôturée sans l’avis du propriétaire. Celui-ci est tenu de les laisser accéder au point d’inventaire. 

L’agent de terrain, collecteur des données forestières

En cliquant sur lecture, vous acceptez les cookies provenant de YouTube

3. La valorisation des données collectées à l’aide de calculs complexes 

Des ingénieurs forestiers qualifient et agrègent les données collectées. Ils mettent au point des calculs complexes croisant les éléments relevés aux étapes précédentes et des informations auxiliaires comme, par exemple, des données géographiques, pour obtenir des résultats de précision optimale.

L’ingénieur d’études, le coordonnateur des projets forêt-bois

En cliquant sur lecture, vous acceptez les cookies provenant de YouTube

Des contrôles sont également assurés tout au long du processus pour vérifier les données et garantir leur homogénéité sur l’ensemble du territoire national. Par ailleurs, la confidentialité est strictement respectée (aucun lien n’est fait entre les données et les propriétés) et les coordonnées exactes de la zone d’inventaire sont protégées par le secret statistique.

Zoom sur trois innovations qui ont révolutionné le travail d’inventaire forestier
  • Les terminaux mobiles : depuis 2005, les agents sur le terrain peuvent saisir et transmettre instantanément les données collectées sur le terrain. 
  • L’orthophotographie infrarouge : l’utilisation de ce produit qui révèle distinctement la nature des essences forestières facilite le travail d’analyse par photo-interprétation depuis les années 2000.
  • Le Lidar : fin 2008, l’inventaire forestier français est le premier au monde à se doter d’un scanner terrestre 3D lidar, pour restituer le volume des arbres et estimer la biomasse.

Mis à jour 20/10/2023